dimanche 28 février 2010

JE NE ME RENDRAI PAS À LA RÉALITÉ

Parfois les hommes vivent et ne se rendent pas.
La passion qui les mène a pour eux trop d'appas.
Ils ont cru quelquefois voir fleurir des folies,
Y ont ajouté foi. Leur oeil s'est ennobli
D'une confiance heureuse et qu'importe qu'ensuite
Ils se soient étiolés en des temps de faillite?
Ils ont connu des jours dont la claire lumière
Saura se perpétuer au moment des revers.
Rends-toi à la raison, me disaient les dociles
Pour qui le seul enjeu est de vivre tranquilles.
Je ne me rendrai pas, devrait-il m'en coûter,
Je ne me rendrai pas à la réalité.
Parfois les hommes vivent et ne se rendent pas.

Parfois les hommes meurent mais ne se rendent pas
Même si leur folie les conduit au trépas.
Ils ont vu quelque part fleurir une embellie,
Ne se résolvent pas à ce qu'on les spolie.
Faut-il qu'à chaque fois le doute discrédite
La puissance d'un rêve aux couleurs de zénith?
Et vous qui décriez le culte des chimères,
Songez que l'illusion à d'autres est salutaire.
Rends-toi à l'évidence, disaient les résignés,
Érigeant en doctrine le fait de se renier.
Je ne me rendrai pas, non, sans le regretter,
Je ne me rendrai pas à la réalité.
Parfois les hommes meurent mais ne se rendent pas.

lundi 1 février 2010

VIRELANGUE VIRELAI

- Veux-tu que je t’esclaboudisse le lignon ?
- Oh oui ! Oh oui, champeluce-moi le finois !
- Je te le champelucerai de rose blond,
Je te le champelucerai de bleu chinois.
Avec le trigoudis, avec la lourmignotte,
Je t’esclaboudirai la main pougnotte.
La main d’andorle gluissante tu t’ébrouiras
Comme les joudingrins de l’Entelubrera.
Et puis tout ça, tout ça, ça recommencera !
Je t’esclaboudirai, te champelucerai,
Je t’esclabucerai, te champeloudirai.


- Et si je te verliquorais la chalmondite ?
- À l’héginarguite, oui, oui, mets la pelusse !
- Je te mettrai la pelusse à la joie-qui-frite,
Je te mettrai la pelusse à la joue-qui-musse.
Bigre verjucouillon et diantre salmincorne,
T’auras la chalmomdite baffie de limiorne
Et tu t’embrinleras au carsimondéra
Comme une rospingelle au bruniteau d’ara.
Et puis tout ça, tout ça, ça recommencera !
Ah oui, la chalmondite ! Oh oui, l’héginarguite !
Ah oui, la chalmarguite ! Oh oui, l’hégimondite !


- Hum ! T’embrinler à la mazigrette pelusse !
- Oui, la zurle limiorne ! Et oui, le zurle andorle !
- Je t’embrinlerai à la carmonette glusse,
Je t’embrinlerai à la glusse perlandorle.
Glusse chozette, glusse mousette et glusse mazigrette !
Je te sens farficule, je te veux forfandette.
Et tu me chanteras La Perlandolera
Tout en t’ébrouissant le carsimondéra.
Et puis tout ça, tout ça, ça recommencera !
Oh très très mazigrette et très très perlandorle !
Oh très très mazidorle et très très perlangrette !


- Oh verliquore-moi, ça ira, ça ira !
Les lourmignottes, mon lignon, on les aura.
Les loudingrins, mon trigoudis, on les aura.
Ah ça ira, ça ira, les salmincornes on les aura !
Et puis tout ça, tout ça, ça recommencera !
- Je t’esclaboudirai, te champelucerai
Ah oui, la chalmondite ! Oh oui, l’héginarguite !
Oh très très mazigrette et très très perlandorle !
Et puis tout ça, tout ça, ça recommencera !
Je t’esclabucerai, te champeloudirai
Ah oui, la chalmarguite ! Oh oui, l’hégimondite !
Oh très très mazidorle et très très perlangrette !
Et puis tout ça, tout ça, ça recommencera !

mardi 26 janvier 2010

CHOIX DE POEMES TRADUITS DU LIVRE XII DE L'ANTHOLOGIE PALATINE couramment appelée LA MUSE PEDERASTIQUE DE STRATON DE SARDES

I
Commençons avec Zeus, comme Aratos l'exige.
Ô Muses, aujourd'hui, je vous laisse en repos.
Car j'aime les garçons certes et j'en ai commerce,
Mais qu'importe cela aux Muses d'Hélicon?
Straton de Sardes


IV
Je jouis avec délices de ses douze printemps ;
Un garçon de treize ans est bien plus désirable ;
Deux fois sept ans, c'est la douce fleur des Amours ;
A l'aube des trois lustres, un gars est fort charmant ;
A seize, il est divin ; je ne recherche pas
L'éphèbe de dix-sept, il n'appartient qu'à Zeus.
En désirer un plus mûr, ce n'est plus du jeu :
C'est souhaiter déjà qu'il ait du répondant!
Straton de Sardes

VII
Les filles n'offrent pas de trou bien ajusté,
Ni un sobre baiser ; leurs parfums sont factices
Et fourbes leurs regards ; point de babil charmant
Ou lascif. Et c'est pire quand elles sont expertes.
Leur derrière est frigide, mais il y a plus grave :
Elles n'offrent nulle prise à la main vagabonde.
Straton de Sardes

VIII
Je passais à l'instant près d'un marché aux fleurs
Quand je vis un garçon tresser roses et grappes.
J'en fus ému, mais placide lui demandai :
"Combien vends-tu ta fleur?" Tel la rose il rougit
Et répondit, baissant les yeux : "Vite, va-t'en!
Si père te voyait!" J'achetai des bouquets,
Pur prétexte, car chez moi, j'en décorai les dieux
Priant pour qu'ils m'obtiennent les faveurs du garçon.
Straton de Sardes

X
Quoique un rare duvet de poils blonds et bouclés
Envahisse les joues tendres de mon amant,
Je ne le quitte pas. Barbe et pilosité
N'empêcheront point que ses beautés m'appartiennnent.
Straton de Sardes

XIII
Hier j'ai pris sur le fait deux glabres médecins
Qui se massaient l'un lautre l'organe de l'amour
Pour calmer sa brûlure. "Motus!" me dirent-ils.
Je leur dis : "Je me tais... Prodiguez-moi vos soins!"
Straton de Sardes

XXII
Ce m'est une souffrance, une épreuve, un bûcher!
Ilissos en arrive à l'âge des amours
- Seize ans c'est idéal - doué de toutes les grâces
D'ensemble et de détail : une voix melliflue,
Des lèvres engageantes et une intimité...
Exquise à posséder. Mais moi je n'en aurai
Que le plaisir de l'oeil, et souvent insomniaque
Combattrai à la main cette passion fantôme!
Scythinos

XXV
Quand Polémon partit, je priai Apollon
De me le rendre indemne et lui promis un coq.
C'est la barbe au menton que Polémon revint.
Et il m'a fui, Phoïbos, sans nul ménagement!
Tu n'auras point ton coq. Garde ton boniment!
Chaume tu m'as rendu ce qui fut tendre épi.
Statyllius Flaccus

XXIX
Protarque est beau, il se refuse. Il dira oui
Un autre jour. Mais la jeunesse passe le flambeau.
Alcée

XXXIII
Héraclite était beau ; mais pubère à présent,
Son pelage rabroue qui le monte à revers.
Fils de Polyxenos, ne fais pas le faraud :
Ton cul même est atteint d'un revers de fortune!
Méléagre

XXXIV
Hier au soir je dînais avec Démétrios
Le maître-gymnaste, ô le plus heureux des hommes :
Un garçon sur son sein, un autre sur l'épaule,
Deux autres lui servaient le boire et le manger.
Le séduisant quatuor! Badin, je demandai :
"Enseignes-tu, mon cher, la gym même en nocturne?"
Automédon

XXXVII
Le malveillant Eros par malice a doté
D'un moelleux fessier l'Amphipolitain Sosarche
Afin d'exciter Zeus. Ses cuisses en effet
Surpassent en douceur celles de Ganymède.
Dioscoride

XLI
Théron n'est plus si beau. L'éclat d'Apollodote
S'est désormais terni. Je veux aimer les femmes.
Laissons les chevriers, ces emmancheurs de biques,
Etreindre des ribauds poilus de la rondelle!
Méléagre

XLIV
Jadis des osselets, une caille, un ballon
Conquéraient les garçons amateurs de présents.
Il leur faut désormais un dîner, des espèces ;
Les jouets ne valent rien! Amant, cherche autre chose!
Glaucos

XLVI
J'ai vingt-deux ans à peine et je suis las de vivre.
Amours, quel est ce mal? Que me torturez-vous?
Si le malheur m'atteint, que ferez-vous? C'est sûr,
Comme avant vous jouerez, sans coeur, aux osselets.
Asclépiade

LII
Tristes amants, l'auster propice aux matelots
M'a ravi Andragathe, une part de mon âme.
O trois fois bienheureux les bateaux et les vagues,
Quatre fois fortuné le vent qui l'emporta!
Puissé-je être dauphin pour que sur mes épaules
Je l'emmène voir Rhodes, île aux bénins garçons.
Méléagre

LVI
Le sculpteur Praxitèle a taillé la statue
D'Eros, fils de Cypris, dans un bloc de Paros.
Mais superbe immortel, Eros a aujourd'hui
Créé à son image un vivant Praxitèle.
L'un dispensant ses charmes au ciel, l'autre sur terre,
L'Amour règne à la fois sur les dieux et les hommes.
Cos, ville heureuse et sainte, a nourri ce divin
Et nouveau Cupidon, le prince des éphèbes.
Méléagre

LVIII
Trézène est aux éphèbes une bonne nourrice.
Point ne t'abuserais si tu y révérais
Le moindre des garçons.Mais Empédocle y brille
Entre autres fleurs vernales comme une jolie rose.
Rhianos

LXII
Vos fils sont beaux, très beaux, femmes perses. Et pourtant,
Aribaze est pour moi plus beau que la beauté.
Anonyme

LXIV
Zeus, prince de Pisa, couronne Peithenor,
Second fils de Cypris, au pied du mont Cronos!
Changé en aigle, ô Dieu, ne me l'arrache pas
Pour qu'il serve à boire au lieu du beau Troyen.
Si ma muse t'a plu déjà par quelque offrande
Permets que je m'unisse à ce divin garçon.
Alcée

LXXIV
Cléobule, à ma mort, - mes restes calcinés
Par l'amour des garçons, déjà, gisent à terre -
Répands du vin sur l'urne ; avant de l'inhumer,
Inscris-y, s'il te plaît, "Don d'Eros à l'Hadès".
Méléagre

LXXVIII
Si Eros, sans ailes, arc, ni carquois sur le dos,
Avait une chlamyde et portait le pétase,
Par le gracieux éphèbe, oui, j'en jure, Antiochos
Serait Eros et Erosserait Antiochos.
Méléagre

LXXXI
Tristes amants aux coeurs épris, vous qui connûtes,
En goûtant l'âcre miel, l'ardeur pédérastique,
Sur mon âme versez une eau froide, bien froide,
Neige à peine fondue. Certes j'ai eu l'audace
D'admirer Dionysios, mais, frères d'infortune,
Calmez ce feu avant qu'il ne m'atteigne au coeur.
Méléagre

LXXXIV
Hommes, secourez-moi! A peine issu des mers,
Mettant en terre un pied de marin néophyte,
De force Eros m'attrait : comme une flamme offerte
La beauté d'un garçon douce à voir resplendit.
Je marche sur ses traces imaginant en l'air
Saisir son doux aspect, tendrement je l'embrasse.
J'ai fui les âpres flots, sillonnerai-je en terre
Les houles de Cypris encor bien plus amères?
Méléagre

LXXXVI
Femme, Cypris incite aux passions féminines,
Mais Eros, lui, régit les amours masculines.
Céderai-je à la mère? Au fils? Je crois que même
Cypris dira ; "Ce galopin est le plus fort."
Méléagre

LXXXVIII
Deux amours tempétueux me consument, Eumachos,
Et je suis prisonnier d'une double passion.
D'une part j'ai du goût pour le corps d'Asandros
Mais l'oeil vif de Télèphe par ailleurs me fait signe.
Tranchez-moi en deux parts, placez-les, j'en suis aise,
Sur un juste fléau et tirez-les au sort.
Anonyme
XCIII
Les garçons constituent un dédale, une impasse :
Où que tu portes l'oeil, il est comme englué.
Théodore séduit par la force profuse
De son corps, par la fleur intacte de ses jambes.
Et voilà Philoclès, menu, ses traits brunis
Sont un charme céleste. Regarde Leptinès
Vois son corps, et tes membres demeurent retenus;
Tu restes en sa trace, un dur métal t'y rive
Car l'éclat de ses yeux rend radieux ce jeune homme
De la tête aux orteils. Salut, jolis garçons,
Puissiez-vous parvenir au printemps de la vie
Et puis vous recouvrir d'une blanche toison.
Rhianos

XCV
Puisque les Cupidons, la fragrante Peithô
Et les Grâces esthètes, ô Philoclès, t'adorent,
Prends Diodore en tes bras ; que chante devant toi
Le doux Dorothéos, qu'à tes genoux s'étende
Callicratès, que Dion échauffe dans sa main
Ton dard qui vise au but, qu'Ouliade le dégaine,
Que Philon te bécote et Théron t'entretienne ;
Pince sous le chiton le téton d'Eudémos.
Bienheureux, si un dieu te fournit ces plaisirs,
Quelle salade d'éphèbes t'accomoderas-tu!
Méléagre

CII
Le chasseur Epicyde est à l'affût des lièvres
Et file les chevreuils, affrontant des sommets
La neige ou bien le gel. Qu'on lui dise : "Oh voilà
Une bête abattue", il ne la prendra pas.
Ainsi va mon amour. Il traque ce qui fuit
Mais délaisse en chemin ce qui gît à sa prise.
Callimaque

CVI
Je ne connais en tout qu'une seule beauté,
Mon avide regard n'a qu'un but : voir Myiskos.
Je suis aveugle au reste et il est tout pour moi.
Les yeux sont-ils flatteurs, voient-ils pour plaire au coeur?
Méléagre

CXIV
Astre héraut du matin, salut! Et reviens vite,
Astre du soir, rendre en secret qui tu ravis!
Méléagre

dimanche 24 janvier 2010

AMOUR A COURRE

La reposée

Il est mon tout petit
Imberbe et mon si frêle
Que, dans mes grandes ailes,
Le crois calme et blotti ;
Dessous ma chair confite,
Il s'abrite et se glisse.
Il dort entre mes cuisses
A l'ombre de ma bite.

La billebaude

Ivre de procéder
A mes tourments de mâle
Sa chaleur jeune et pâle,
Il les sent bien céder
Contre sa peau vaincue
Dont le don point ne cesse.
Moi je dors sur ses fesses
Au calme de son cul.

L'empaume

Alors il me possède
Moi son grand bétail fauve
Et me voilà son pauvre
Joujou de Diomède.
De ma toison recuite
S'est fait une pelisse.
Il veille entre mes cuisses
En maître de ma bite.

L'hallali

Mes désirs se ravivent.
Feignant de se soumettre,
La pièce qui le fit naître
Il tranche à l'incisive.
Sa monture déchue
Faudra qu'il la dépèce.
Je gis entre ses fesses
A merci de son cul.

La curée

Il est mon grand veneur,
Il rassasie ses faims,
Se revanche et me vainc,
Il dépouille mon coeur
En fait sa proie. Un rite
Tend mon vit à son calice!
Il fouit entre mes cuisses
En dévorant ma bite.

samedi 23 janvier 2010

PEUT-ETRE QUELQUE CHOSE DES TERRES EN GESINE

Quand le pasteur perd pied au versant qui s’affole,
Sa songerie s’enraye et ses brebis se taisent ;
Il scrute les sommets où plane l’hyperbole.
Elles fouillent les ravins où niche son malaise.

Les ouailles et le berger aux rôles égarés
Cohabitent peut-être dans les reliefs amers
De tes grands paradoxes. Lave tes noirs secrets
Aux douceurs de mes mains qui te seront sanctuaire.

Peut-être quelque chose de la gaieté meurtrie
Des cailloux qu’en leur chant lavent, tannent et brisent
Les torrents du val d’Aure quand à grelots tu ris
Puis qu’un vol noir te fige où toute joie s’enlise.

Peut-être quelque chose de la convulsion fière
Éruptive et violente des montagnes qui germent
Lorsque offrant ton visage à mes rigueurs sincères
Tu m’adoptes pour maître et me remets les armes.

Peut-être quelque chose en toi de ces magmas
Malléables et fous qu’expectore en sa braise
Une ivre orogenèse quand à ton estomac
Le doute noue des lacs que nul contact n’apaise.

Peut-être quelque chose de l’âpreté des rocs
En toi qui s’élabore quand ton regard battu
Vient quêter le frisson dessous l’onde des chocs
Et l’avalanche bleue dessous mes poings obtus.

Peut-être quelque chose du périlleux chaos
De dénivellations qui d’écorce jaillirent,
En ton verbe fastueux, quand ton ardeur va haut,
En ton mutisme sec, quand ton humeur chavire.

Peut-être quelque chose en toi de ces crevasses,
Vertiges minéraux où s’affame la terre,
Lorsque pour rassasier tes entrailles tenaces,
Tu suscites mes flux, te repais de ma chair.

Tu es l’animal tendre qu’à ma baume les pics
De Néouvielle, de Tramezaïgues et d’Arbizon,
Après tant de traverses, de saisons chimériques,
Ont un soir amené, soir d’or et de blason.


*

Quand le meunier s’en va d’une allure rassise
Moudre au vent le grain dur d’une récolte riche,
Il revoit les étés de chétives remises
Où disette fut comble quand le blé se fit chiche.

Il connaît trop l’angoisse des greniers désertés
Pour se fier aux leurres d’éphémère abondance.
Le manque me fait peur. Offre-moi sans compter
La douceur de ta peau où je puise confiance.

Peut-être quelque chose de ces plaines à seigle,
Ligne plane des orges, enclume ou céréale,
Dont un frisson de vent n’incline point la règle,
En mon immobilisme immuablement étale.

Peut-être quelque chose en moi de ces semences
Uniformes et lentes qui mettent à germer
Plus de poids et de temps que n’en a la patience
Quand tarde une moisson qu’automne compromet.

Peut-être quelque chose en moi de ces épis
Qu’offre une canicule horizontale et mate
A l’aplomb sclérosé d’un soleil assoupi
Comme un comble de vie qu’en l’écrasant juin rate.

Peut-être quelque chose de ces clochers de pierre
Tyranniques et vains qu’érigent les églises
Sur les lignes de socs, quand mon corps désespère
D’assez te féconder, Sisyphe qu’on n’épuise.


Je suis la bête sombre que les flèches de Beauce,
Les clochers de Janville, de Chartres ou ceux d’Allaines,
Aux solaires amis sur qui tes jours s’adossent,
Un soir ont raboutée, soir navré de déveine.


*

Peut-être ai-je su voir aux éboulis de pierres,
Tes yeux accidentés aux impérieux espoirs.
La consomption des monts est tenace à tes chairs
Qu’elle écorche et avive quand des loups y vont boire.

Hélas, je n’ai pas su apprivoiser tes peurs.
Ta détermination aux exigences nouées
Cristallise en déni nos harmonies majeures,
Elle brise et saccage ce qu’amour a dévoué.

Peut-être le sais-tu, sous une plaine grouillent
Des hydres, des cerbères, des tarasques chtoniennes,
Des catoblépas fous. Le coma des gargouilles
Éclate de stridences quand les monstres adviennent.

Hélas, tu n’as pas su les tenir en respect
Et moi, pleutre, j’abdique aux Parques du vorace,
Aux chimères du manque et ne sais rescaper
Ce qu’amour a tissé ; mes frayeurs le fracassent.

Le meunier dissimule en sa fébrilité
Ses terreurs de néant. Et le pasteur cultive
Ses ferments prolifiques dessous l’oisiveté.
N’est-ce pour exaucer leurs douceurs effusives ?

La montagne a ses maux, la plaine ses douleurs.
Abolir leur distance, les mettre en résonance
De soubresauts intimes, de tourments et de heurts,
N’est-ce pour exaucer surrection de leurs chances ?

Car la géographie jamais ne se fourvoie !
Si par consentement improbable, inouï,
Et Beauce et Pyrénées d’exception se pourvoient
N’est-ce pour exaucer des cimes éblouies ?

Accordez, terre mère, accordez à ces hommes
Des sommets ou des champs l’alliance sans lésine,
La concorde des sols qui d’amour font la somme,
L’heureuse tectonique des terres en gésine.

VANITES ET VENETTES

Que ne suis-je une marmotte
En sa saison close et morte,
Là, pelotonnée douillette,
Sous couette d'entrailles quiètes?
Vive, vive la marmotte!
Qui tant dort n'est point idiote
Car dormir est une fête
Quand les jours vous sont venette.
Que ne suis-je une marmotte?

Que ne suis-je une bigote
Qui ses oraisons marmotte
Et patenôtres répète
Pour une foi qui s'entête?
Que louée soit la bigote!
A ces comptines dévotes
Faut bien qu'elle s'en remette
Car la vie tend à disette...
Que ne suis-je une bigote?

Que ne suis-je anachorète
Et bien propre dans ma tête :
Jamais un espoir n'y flotte,
Plus aucun désir n'y trotte.
Hourra pour l'anachorète!
Il a su faire place nette,
Fi donc les chimères sottes!
Le bonheur... sale marotte!
Que ne suis-je anachorète?

Oh! Que ne suis-je un squelette
Vide, blanc, sec et inerte?
A quoi sert qu'on nous fagote
D'humeurs vives qui sanglotent?
Hosanna pour le squelette!
Poignées d'osselets qu'on jette
Par jeu au vent qui grelotte,
A qui rien, plus rien n'importe!
Oh!Puissè-je être un squelette!

BALLADE DU BUVEUR DE BLANC

Dehors, j'entends ce soir
Paris rire à Paname,
Et rue de Rochechouart,
L'accorte lune acclame
Un joyeux mimodrame.
Mon cœur brassant l'espoir
Pour un Pouilly s'enflamme.
Verse-moi donc à boire.

Dans la nuit, j'entends choir
Les voyous sur leur lame,
Et la chair des trottoirs
S'infecter rue Madame
D'un crime qu'on diffame.
Mon cœur broie des mots noirs
Dans un vin blanc et clame :
"Verse-moi donc à boire ! "

J'entends l'aube pleuvoir
Sans qu'encore aucune âme,
Rue de la Tombe-Issoire,
N'accompagne mon âme
Nue que l'amour affame.
Ce n'est qu'un cru de Loire
Que mon cœur te réclame ;
Verse-moi donc à boire.

Cabaretier qui blâmes
Ma propension notoire
Aux vineux amalgames,
Verse quand même à boire.

BALLADE DU CUEILLEUR D'ANGES

Sur le pavé bleu de tes rues
Et ses ramages parquetés,
Sur tes façades parcourues
De vieux mascarons arrêtés,
Paris, fantastique cité,
Sur tes toits noirs de zinc qu'effrange
La lumière aux tresses teintées,
J'irai cueillir des ailes d'anges.

Sur vos précieux textes abstrus,
Vos noirs ex-libris contrastés,
Sur vos gardes aux bouquets drus,
Fleuries au peigne ou cailloutées,
Volumes par quelque âme hantés,
Sur vos reliures aux losanges
En plein maroquin biseautés,
J'irai cueillir des ailes d'anges.

Sur ton plein sein de paix recru
Où se réverbère l'été,
Sur tes hanches d'amour férues,
Tes reins au fier rebond sculpté,
Compagnon de mes voluptés,
Sur ton ventre qu'un duvet mange,
Herbe ténue de mon Léthé,
J'irai cueillir des ailes d'anges.

Vous mes trois passions, permettez
Que mes nuits en vos quiètes granges
Soient de mirages exaltées.
J'irai cueillir des ailes d'anges.

POUR UN CHANT D'AMOUR NEGRE

Tu es venu
Dans ma jeunesse,
Tu es venu
Y poindre liesse.

Nègre d’ambre et nègre d’or,
Nègre membre et nègre Adam,
Nègre d’amble et nègre fort,
Nègre fin et nègre enfant.

Tu es venu
Porte-sagesse,
Tu es venu
À maladresse.

Nègre orfèvre de ténèbres,
Nègre de fièvre à nous deux,
Nègre aux lèvres qu’on ne sèvre,
Nègre plèvre ivre à nos feux.

Tu es venu
Comble d’altesse,
Tu es venu
Battre prouesse.

Nègre noir à ton tambour,
Nègre au contre-jour d’un square,
Nègre un soir de tant amour,
Nègre aux atours d’un revoir.

Tu es venu
Faire promesse,
Tu es venu
Qui me délaisses.

Nègre beau, sexe à bonheurs,
Nègre leurre aux fleurs latex,
Nègre faux, sexe menteur,
Nègre ailleurs au cœur silex.

Tu es venu,
Ma proie d’aînesse,
Tu es venu
Que rien ne cesse.

Nègre d’ombre et nègre d’or,
Nègre flambe et nègre à dents,
Nègre cendre et nègre mort,
Semble nègre et nègre à blanc.

SOIRS DE 1982

Un espoir s'est voilé sur sa hampe d'albâtre,
Une rose a chanté les jours de flétrissure.
II pleut des larmes d'air, de sel et d'eau grisâtres
Dans le cours des torrents. Demain n'est pas bien sûr.

La voix rechantera aux calvaires du soir
Processions d'amour et rêves d'eau bénite.
Les promontoires d'or s'achèveront en noir :
Oboles du passé dont un destin s'acquitte.

Et toi, tu reviendras, sous tes paupières sèches,
Défaire la quiétude inquiète d'aimer.
Minuit aura sonné dans la chaleur grièche
Quand aux carrières d'ambre tu reviendras sonner.

Je t'ouvrirai la porte et la lumière brève
Dira si ton amour, un soir puis un matin,
Encor saura m'avouer la tendresse des lèvres
Ou bien reprendre en mains la fierté d'un dédain.

Le cyprès aux yeux tristes, accablé de désir,
Est mort. Et ma mémoire ressasse languissante
L'histoire d'un printemps à l'orée du plaisir :
Clairières de caresses où un bonheur s'augmente.


Mémoire ridicule dont les hommes se moquent :
Le cyprès s'est fané et ses yeux ne sont plus
Que de vagues reproches épars dans la voix rauque
D'un bloc de bronze pur que j'ai trop tôt connu.

La porte refermée, sous l'ombre des murs, danse
La sarabande niaise des jaloux sans fortune
Au cœur lardé de dots et de tristesses rances.
Et le spectateur rit ; des sanglots sur la dune.

Sur la dune de mort, un espoir lacéré
Claque misère longue en ses lambeaux livides.
C'est la risée des preux, des heureux et des muets
Ébahis d'avoir vu la nuit dans un cœur vide.

Avec eux, toi tu ris et tu oublies qu'un jour
Tu fus le cyprès et l'espoir du pauvre niais
Malade qui le soir se rappelle toujours
Tes serrements à l'âme au creux d'un même été.

Et le fanion s'est tu. Oripeaux du malheur
Se taisent de douleur sur la côte d'Armor
Quand comme un vol funèbre, le phénix du bonheur
Fuit le vieux continent où il sème la mort.

Puis tu t'endormiras, saoulé de plaintes veules
Timides et chétives. Et je m'endormirai
Sur un banc d'algues vertes, plus soucieux de celle
Qui dans ses torves antres a percé le secret

De ton sourire clair où se noie mon soupir
Que de celle-là qui a souffert pour que vivent
Les tortures arides d'un impossible empire.
Je suis une humeur noire à toute joie rétive.

Le saule dans ses branches lamente sa complainte
Et la confie peut-être aux frissons de la mer.
Dans la tourmente vogue, toute confiance éteinte,
Un navire sans mât qui n'a plus peur d'hier

Mais qui demain encor heurtera les rivages
Désenchantés du monde. Si tu l'as bien aimé,
Il te racontera la douleur de cet âge
Où le malheur empire à qui veut trop aimer.

dimanche 14 juin 2009

LA PETITE COCHONNE DES HAUTES-PYRENEES

Ah si comme moi vous aviez connu
Le hoquet de joie grise qui cabriole
Et fait grelot à son rire menu...
Ma joue qui frise et le cœur qui cajole…
Ah si comme moi vous aviez perçu
Ses yeux talés de craintes sans issue
Où la supplique cerne un sourd éclat…
L’iris se brise et mon cœur est tanné…
Vous auriez aimé le museau de la
Petite cochonne des Hautes-Pyrénées.

Ah si comme moi vous aviez reçu
Sa pleine confidence de mots heureux
Quand le besoin de dire aux lèvres sue…
Mon ouïe s’enivre et le cœur qui s’émeut…
Ah si comme moi vous aviez pâti
Du taciturne accueil en chuchotis
De querelle noire quand le mot rare est glas…
Le verbe est gauche et mon cœur piétiné…
Vous auriez aimé le babil de la
Petite cochonne des Hautes-Pyrénées.

Ah si comme moi vous aviez senti
Comme elle se donne entre cuisses d’homme,
Comme à satisfaire elle s’assujettit…
Ma bite s’enfle et le cœur métronome…
Ah si comme moi vous aviez brandi
Un chibre exultant sous les appétits
Folexorbitants qu’en l’anus elle a…
Le désir qui fuse et mon cœur fané…
Vous auriez aimé les chaleurs de la
Petite cochonne des Hautes-Pyrénées.

Messieurs, comme moi, eussiez-vous eu la
Joie de la baiser, vous l’auriez aimée !
La connaissez-vous ? Connaissez-vous la
Petite cochonne des Hautes-Pyrénées ?

samedi 16 mai 2009

TU MOURRAS

Un matin de nuages, ventres d’outres cornues,
Je criblerai de coups à surin que veux-tu
Ton bedon de chimères, je criblerai debout
Le souffle nébuleux de ton ventre à tous coups.

Et tu crieras,
À panse déployée,
Viscères aboyés,
Et tu mourras
Comme meurent les gens
Au vivre intransigeant.

Un soleil au zénith et feux corpusculaires,
Je talerai de bleus, à poings flétrissant l’air,
Ta chair ivre de feux, je talerai tes yeux
Au zénith mort béants, marqués de horions bleus.

Et tu crieras,
En regard des douleurs
Les plaisirs de la peur,
Et tu mourras
Comme meurent les arbres
Sous cognée de cinabre.

Un soir de blonde lune à gorge cornoueuse,
J’éteindrai tes quinquets de ma main vigoureuse
À ta gorge nouée, j’éteindrai les reflets
Châtain-roux sous la lune de tes fauves quinquets.

Et tu crieras,
Invoquant l’outre-monde
À gorge moribonde,
Et tu mourras
Comme meurent les bêtes
Au fanal des tempêtes.

Une nuit d’or saignée, d’astres écorchés vifs,
Je trancherai ton cou d’un eustache incisif,
En trachée qu’on dévaste, je trancherai le goût
Du gros sang qu’à bouillons borborygme ton cou.

Et tu crieras
À gargoine fendue
Un gargouillis ténu,
Et tu mourras
Comme meurent les astres
Au trou noir des désastres.

Un jour n’importe quel, qui de cordes se navre,
Je pendrai à leur nœud ma viande, mon épave,
À son croc je pendrai ma carcasse de gueux
Car qu’importe à mes chairs la raideur de ma queue ?

Et je crierai,
À gosier rétréci,
Ma besogne accomplie,
Et je mourrai
Comme meurent les morts
Arrivés à bon port.

vendredi 1 mai 2009

EL DESCOJONADO

Je suis le malheureux, le bœuf, le diminué
Le prince charolais à la gloire abolie :
Mon fier organe est mort et mes burnes fauchées
Ne sont qu’un souvenir empreint de nostalgie.

Dans la nuit du Regret, ô toi qui m’as castré,
Rends-moi mes testicules et l’ardeur de mon vit,
La queue qui plaisait tant aux vaches de mon pré,
Et ce noble attribut qui suscitait l’envie.

Suis-je mâle ou bien non ? … Priscilla ou Éon ?
Mon entrecuisse encor porte une cicatrice ;
J’ai perdu dans l’étable mon précieux appendice…

Et j’ai de déshonneur pleuré cette ablation
En beuglant tour à tour de ma voix d’opéra
Les soupirs de l’Eunuque et les cris du Castrat.

CAROTTE

Mais Vénus est bien basse ce soir sous les ors fuligineux qui courent de vertugadin en vertugadin. Et son rire est bien las, placide et mal en point. De lucarne il n’en est mie qui sirote une absinthe extatique. Bah ! la lune dans son corridor tragique catapultera bien quelques loupiotes asthmatiques avant que ne cavalcadent aux venelles ambiguës les beaux archers du roi. L’amour est ainsi fait. Une ribambelle de bigarreaux l’égrène avec maestria tandis que l’on surine en veux-tu en voilà. Dodeline, Vénus, dodeline. Tes oripeaux clapotent au sirocco. Carotte.

L'IMPRESSION ET LA DOULEUR DU TEMPS

Une brume de songe se ravive en ses lymphes fanées. Le souvenir surnage sur les eaux affadies du canal tandis qu’aux entrailles liquides le fruit déjà se désagrège. Ce qu’il reste des jours après usage des heures dont ils furent faits. Ce qu’il reste des nuits. Demeurent l’impression et la douleur du temps. Demeurent la fiction et la douleur du sentiment. L’horloge s’enchaîne à ses aiguilles d’argent. Une heure sonnera. Que n’est-ce la même heure que celle qui tintait l’angélus du présent au temps où le passé ne l’était pas encore ? Et les clepsydres truquées n’y pourront rien changer, pas plus que les horodateurs en panne.
Il était une fois une heure suspendue. Il était une fois des hommes qui s’y suspendirent. Ils étaient jeunes encore quand commença le temps de suspendre les heures et ils le reculèrent. Ils firent quelques temps patienter le siècle et puis ils s’y jetèrent.

mardi 23 décembre 2008

NUIT DU 16 AOUT

Les fétus de ton cœur, braises de mots, font leur ronde de nuit,
Aux routes du plateau, valse et volète la voix de ton récit.
Houeydets au cimetière, village sombre et la maison d’ici
Repassera par là ; années d’enfance. La porte d’un ami,
Souvenirs d’Escala, les gens, les joies t’ouvrirent un logis.
Des routes dans le noir, mémoire émue, fausse chronologie.

Puissent un jour tes phrases cantilènes,
Puissent un jour
Faire tes confidences que je comprenne
Ton long parcours.

Et ta voix qui reprend, écoute, écoute, mes traverses de vie,
L’œuvre de mes parents, pauvre à bonheur, et leurs jours interdits.
Écoute ma parole et fière et forte, écoute, je te dis,
Les lacs d’Aventignan, journées de neige, les soirs des Baronnies,
Les cheminées d’usine, écoute, écoute ces temps ensevelis.

Saurai-je un jour, à voix brune et sereine,
Saurai-je un jour
De ta lunaire enfance chanter le thrène
Aux lents détours ?

Ma longue réclusion, jeunesse à peine, silence consenti.
Attraper des oiseaux, piège à chagrin. Je m’embrase d’envies.
La reconstruction lente, désir qui porte, puis la photographie.
Les soirs à la piscine, bleus de travail, et renaître aujourd’hui.
Que cesse la contrainte, j’ai voulu vivre, je suis venu d’ici.
Cette ronde de nuit pour te dire : ce noir est mon pays.

mardi 2 décembre 2008

LEXICALE FANTAISIE

Joue, petit Paco,
Joue le jeu dingo
Des mots inégaux
Dont rime l’écho.

Coq au vin et rococo,
Brocolis et coquelicots,
Colibris et noix de coco,
Bécots, corbeaux et bocaux.


Jouis, petite chipie,
Du mot qui vrombit,
Jouis de ce fourbi
De sons qu’on pépie.

Porc-épic et Kho-Phi-Phi,
Pipistrelle et okapi,
Pythonisse et dame-pipi,
Tapis, pitas et tipis.


Joue, petite Assa,
Sur un cha-cha-cha,
Le jeu d’entrechats
Des vers qu’on tressa.

Sapajous et samoussas,
Sassafras et harissa,
Salsifis, raspoutitsa,
Poussahs, sapins et salsas.


Joue, petit poulbot,
Au son du pipeau,
Guide le troupeau
Des mots du mambo.

Boniments et bonobos,
Bochimans, Carabobo,
Bord à bord et nelumbos,
Robots, bories et rabots.


Jouis, petite Olga,
Du jeu délicat
Où le lexique à
L’humour se ligua.

Gargarisme et seringa,
Galuchat et galanga,
Gagarine et alpaga,
Aghas, galas et légats.


Jouis, petite Suzy,
De la fatrasie
Des mots fantaisie,
Joue la poésie.

Gaspésie et agueusie,
Syzygie et Silésie,
Zizanie et peigne-zizi,
Sosies, ciseaux et zanzi.

LA PRETENTAINE

Les carrosses au bois vont,
Les calèches au bois viennent.
C'est la danse des barons,
Le quadrille des duègnes.
Les laquais sont bourguignons,
Les caméristes lorraines.
C'est Étienne ou Odilon,
Margoton ou bien Germaine,
Une blouse de coton,
Un tablier de futaine.
Au galop des canassons
Et d'une rosse bréhaigne,
Les carrosses au bois vont,
Les calèches au bois viennent.

On se balade en chanson,
En musique on se promène
Sur un solo d'hélicon,
Sur une joyeuse antienne.
Chante, danse, laridon,
Tourne et vire, marjolaine.
Les duègnes et les barons,
Les Bourguignons, les Lorraines,
Enchantés de l'occasion
Et ravis de cette aubaine,
Préfèrent le rigodon
À une valse de Vienne.
On se balade en chanson,
En musique on se promène.

Aux violettes le frisson,
À jonquille les fredaines.
On se fait déclaration
Dessous la feuille d’un chêne :
“ Que ton sourire est mignon ! ”
Dit à Marion Madeleine.
Lors la duègne lui répond :
“ Et toi tu n’es pas vilaine ! ”
Volez jupes et jupons
Quand s’embrassent les sirènes.
Madeleine et Marion
Aux bonnes mœurs contreviennent.
Aux violettes le frisson,
À jonquille les fredaines.

Jours d’avril à l’horizon,
Soirs de mai à perdre haleine.
“ Tu es fort joli garçon,
Dit Léon au bel Arsène.
Merci, reprend le baron,
Veux-tu que je t’appartienne ? ”
Adieu braies et caleçons,
Dans l’extase point de gêne.
Sur un tapis de gazon
Qui fleure bon la verveine,
Arsène et le grand Léon
À toute force s ‘étreignent.
Jours d’avril à l’horizon,
Soirs de mai à perdre haleine.

Quand vient d’amour la saison
Il arrive qu’on s’éprenne.
Ainsi les petits tendrons
Finissent au lit des reines
Et dessous les édredons,
Elles jouent croquemitaine.
Perle la sève aux bourgeons,
La rosée aux cyclamens.
Alors les tendres gitons
Épris de leur capitaine
Sautent à califourchon
Dedans l’ombre des persiennes.
Quand vient d’amour la saison
Il arrive qu’on s’éprenne.

DES GNONS

J’aime tes mains
Quand tu me tiens.
J’aime tes mains
Sur mes reins.
Aux instincts
Masculins
Souverains
J’appartiens.
J’aime tes mains
Quand tu me tiens.
J’aime tes mains
Sur mes reins.

Oh oui fous-moi des gnons !
Vas-y flanque-moi des beignes !
Des gnons et des châtaignes,
Des gnons et des horions,
Oh oui c’est ça qu’est bon !
Une vilaine mornifle,
Voilà qui m’ébouriffe !
Oh oui fous-moi des gnons !
Balance-moi une peignée,
Une danse, une avoinée !
Oh oui c’est ça qu’est bon,
Les ramponneaux, les gnons,
Les gnons et les horions !

J’aime tes pognes
Quand tu me cognes.
J’aime tes pognes
Sans vergogne.
La carogne
Qu’on pitrogne
Point ne grogne
À besogne
J’aime tes pognes
Quand tu me cognes.
J’aime tes pognes
Sans vergogne.


Oh oui fous-moi des gnons !
Vas-y flanque-moi des beignes !
Des gnons et des châtaignes,
Des gnons et des horions,
Oh oui c’est ça qu’est bon !
Une vilaine mandale
Et voilà que tu m’emballes !
Oh oui fous-moi des gnons !
Balance-moi une peignée,
Une danse, une avoinée !
Oh oui c’est ça qu’est bon,
Les ramponneaux, les gnons,
Les gnons et les horions !

J’aime tes pattes
Qui m’exploitent.
J’aime tes pattes
Ça me rend moite !
Que ne soit
Une ingrate
La frégate
Que tu lattes !
J’aime tes pattes
Qui m’exploitent.
J’aime tes pattes
Ça me rend moite !

Oh oui fous-moi des gnons !
Vas-y flanque-moi des beignes !
Des gnons et des châtaignes,
Des gnons et des horions,
Oh oui c’est ça qu’est bon !
Une vilaine torgnole
Et voilà que je décolle !
Oh oui fous-moi des gnons !
Balance-moi une peignée,
Une danse, une avoinée !
Oh oui c’est ça qu’est bon,
Les ramponneaux, les gnons,
Les gnons et les horions !

MATHILDA

Un soir de froid, un soir d’hiver au soleil clair,
Sur les trottoirs luisants et noirs de Buenos Aires
Tu promenais ton ambition de cinéma.
Affranchie de l’humiliant anonymat,
Tu te rêvais fière starlette dont les succès
Sur les ondes et sur les écrans toujours croissaient.

Et ce soir-là, tu rencontras le blond Victor
Tendre voyou au cœur sensible des quartiers nord.
Pour quelques mois, tu fis de lui un pur James Dean
Il vit en toi sa noble idole, sa Marilyn.
De tous les hommes, c’est le premier que tu connus,

Tu lui offris ta vie, ton âme, sans retenue.
Il te trompa, t’abandonna brutalement,
Tu conservas la nostalgie de ces moments
Entre ses bras, peau contre peau, dans son épaule
Lorsque deux corps mutuellement s’aiment et se frôlent.

Mathilda, Mathilda,
Chante, chante sans crainte
D’avoir à te méprendre
Les effusions tendres
De ton cœur, de ton ventre
Où la première empreinte
D’une amour se fonda.
Mathilda, Mathilda,
Chante, chante sans crainte.

Un soir de brise, un soir d’arômes exhalés
Par le printemps, lorsque s’enflamment les giroflées,
Tu promenais au long du golfe napolitain
L’avènement fragile encore et incertain
D’une carrière de comédienne de second ordre
Quand la passion vint impromptu en ton cœur mordre.

C’est ce soir-là que tu croisas le beau Carlo
Cheveux de jais, œil de velours et trémolo
De baryton. Son père était un producteur
De pellicule fort renommé, globe trotter
Cosmopolite des studios et des festivals.

Presque cinq ans, vous partageâtes sans nul scandale
Jours où sans cesse à l’un à l’autre on se dédie.
Mais c’est tentant pour une actrice la tragédie !
Par goût du jeu, tu séduisis son père aussi
Et d’Amalfi, vous fîtes voile vers Sainte-Lucie.

Mathilda, Mathilda,
Le chant de tes étreintes
Fit fondre l’or et l’ambre
Qu’un plaisir vient répandre
Au creux fervent des membres
Qu’une amour sans atteinte
Intimement souda.
Mathilda, Mathilda,
Le chant de tes étreintes.

Un soir de calme, soir de passion du Pacifique,
Tu promenais sur Mulholland ton euphorique
Et fier succès dans un coupé ivre de gloire,
Toi la vedette idolâtrée des écrans noirs.
Mais solitaire, déjà lassée de ces romances
Désabusée, tu ignorais la providence.

Or ce soir-là, elle t’amena le grand Nelson
Fils merveilleux d’une Havane que l’on bâillonne,
Un long athlète aux pieds véloces et au visage
De candeur fauve. Sitôt l’amour fut mis en cage
Et n’eut de cesse de vous unir plus tendrement.

Hélas, hélas, bien trop souvent, l’amour nous ment.
Et quand il crut lire en tes yeux la lassitude
D’un coup de foudre à son déclin, sa force rude
Jadis aimante se fit brutale. Il s’emporta
Et d’une lame féroce et dure, il te cribla.

Mathilda, Mathilda
Ta chanson s’est éteinte
Dans une sombre chambre,
Et ton sang vint s’épandre
Au lit de palissandre
Dont une amour défunte
Souille à jamais les draps.
Mathilda, Mathilda
Ta chanson s’est éteinte.

ROUDOUDOU ET TAGADA

Le soir quand je déprime,
Toute seule dedans mon home,
Un peu de vague à l’âme
Et le cœur qui s’embrume
De voir que nul ne m’aime,
Sans y prendre de plaisir,
Mais sans plus de remords,
J’avale à toute allure
Des calories en barre,
De pleines bonbonnières.

De la réglisse,
Du chocolat,
Des papillotes
Et des choupas.
Moi, voyez-vous,
Je suis roudoudou.
Moi, c’est comme ça,
Je suis tagada.



J’avoue, je me remplis,
Je me bourre le coco.
Sans jamais me rassasier,
Je m’éclate l’estomac.
Et quand il n’y en a plus,
Écœurée d’être grosse
Comme une contrebasse,
À peu que je ne vomisse,
Je me sens en détresse
Car j’en veux toujours plus.

Des caramels,
Des calissons,
Des pâtes de fruits
Et du touron.
Moi, voyez-vous,
Je suis roudoudou.
Moi, c’est comme ça,
Je suis tagada.



Abreuvée de glucose,
Gavée de friandises,
Enfin je suis obèse
Et je n’ai nulle excuse.
C’est vraiment pas l’extase :
Des complexes à la pelle
Me rongent et m’obnubilent.
Je n’ai pas le moral.
Alors foin des scrupules,
En bouffant, je me console.

Des pommes d’amour,
Des chamallows,
Des fruits confits,
Des berlingots.
Moi, voyez-vous,
Je suis roudoudou.
Moi, c’est comme ça,
Je suis tagada.


Depuis six mois maintenant,
À chacune son chacun,
Je vis avec un garçon
Svelte comme un mannequin.
Je suis son complément,
Sa belle un peu replète,
Dit-il à chaque minute.
Et quand il me mignote,
L’amour me rend béate,
Heureuse, j’ingurgite

Des sucres d’orge,
Des orangettes,
De la guimauve
Et des sucettes.
Moi, voyez-vous,
Je suis roudoudou.
Moi, c’est comme ça,
Je suis tagada.

BALLADE DES AMANTS PERDUS

C’est à Athènes ou à Hambourg
À Caracas, à Inverness,
Dans des jardins ou des faubourgs,
Des bars sans aveu ni promesse,
Des bouges où le désir s’abaisse,
C’est à Bangkok que j’ai connu
Ces gars dont j’aime la jeunesse.
Que sont mes amants devenus ?

Plaisir fugace ou fier amour,
Quête de chair ou de tendresse…
Je les ai pénétrés toujours,
Chéris parfois avec ivresse ;
J’ai souvent dormi sur leurs fesses
Et caressé leur ventre nu.
Je me souviens mais je ne sais ce
Que sont mes amants devenus.

Ils étaient noirs comme un tambour,
Ils étaient blonds comme à kermesse,
Ils étaient fins comme un labour,
Aussi menus que l’edelweiss
Ou aussi forts que la prouesse ;
Mais tous, ils m’avaient tous ému.
Je me demande avec tristesse ce
Que sont mes amants devenus.

Vous tous, mes amants, mes altesses,
Vous tous que mes bras ont tenus,
Est-ce qu’encor vous intéresse
Ce que je suis, moi, devenu ?

BALLADE DES SITUATIONS DE COMMUNICATION

"-Réponds, quelle heure est-il ?
Est -ce bientôt midi ?
-Pardon, qu'est-ce ? Plaît-il ?
-Je voulais qu'on me dît
L'heure juste pardi.
-Je n'entends rien, brave homme.
-Que les sourds soient maudits !"
Quel dialogue à la gomme !

"-Hurler me faudra-t-il ?
L'heure en vain je mendie.
-Hein, Du lait volatil ?
Quel arrangement, dis ?
-Cieux, quelle maladie !
-Dieu fait le mal à Tom ?
-Bougre d'idiot maudit !"
Quel dialogue à la gomme !

"-Enfin, rends-toi utile,
Dis-moi l'heure, étourdi.
-Je cueille un bleu pistil
En ce vert paradis.
-Oh quel salmigondis !
-Rejoue-moi ton péplum.
–Frappadingue maudit !"
Quel dialogue à la gomme !

Abstruse prosodie,
Le langage des hommes
N'est qu'une parodie
De dialogue à la gomme.

BALLADE DU SODOMITE IMPATIENT

"Oh ça ! Pédique-moi !
Viens donc me déflorer !
Pénètre, cher François,
Mon halitueux œillet.
Sache déverrouiller
Mon intime antichambre.
Force-moi le discret."
Quels mots doux à entendre !

"Ah ! Sodomise-moi !
Sois prompt à m'embrocher
L'orifice sournois.
François, viens me baiser.
Fiche en mon faux-connier
Ton titanesque membre.
Sus au petit guichet ! "
Quels mots doux à entendre !

"Vas-y, encule-moi
Sans plus me ménager !
Plante ton beau lourdois
Dans mon prose emmanché,
François, pour mieux niquer
Ma lucarne et répandre
Ton foutre surchauffé."
Quels mots doux à entendre !

Toi, mon zob, satisfais
Sans délai le cœur tendre
Qui t'a sollicité
De mots doux à entendre.

L'ARISTOLOCHE

On dit qu’y a des gosselines
Peu portées sur la chose
Qui ne jurent que par les roses.
Ça c’est une fleur pourprine
Flatteuse à la narine
Mais bien froide et morose.
Bref, c’est un bouton de rose.

Mais la fleur dont je m’entiche,
Moi, c’est l’aristoloche
Car ses couleurs m’aguichent !
Ça c’est une fleur pas moche.
Ça c’est l’aristoloche !

On dit qu’y a des greluches
Fort coquettes et discrètes
Qu’en pincent pour la violette.
C’est fleur de fanfreluche
Qui dans les bois s’embûche
Mais ne vaut pas tripette.
Bref, ça c’est la violette.

Mais la fleur dont je m’entiche
Moi, c’est l’aristoloche
Qu’est pas pour les godiches !
Ça c’est une fleur pas moche.
Ça c’est l’aristoloche !

On dit qu’y a des mistonnes
De Vénus favorites
Qui kiffent la marguerite.
Ça c’est une fleur friponne
Qu’effeuillent les mignonnes
Mais au cœur rien ne palpite.
Bref, c’est la marguerite.

Moi, la fleur dont je m’entiche,
Moi qu’aime tant les gavroches
Qu’ont pas un sou en poche
Ah ! c’est une fleur pas moche.
Oui, c’est l’aristoloche !
Ça c’est une fleur de riche,
Une fleur qui sent l’artiche,
Des aristos le fétiche !
Ça c’est une fleur pas moche.
Ça c’est l’aristoloche !

BALLADE DES HELLEBORES

Blanche fleur qui reposes
Sur un clin de lumière
Où la nacre compose
Ton pâle éclat de mer,
Tu ourdis et espères
La promesse d'éclore.
Demain dans ce parterre,
Fleurira l'hellébore.

Humble avènement rose
Aux pétales austères
Qu'une ombre mate arrose
De grêles et d'hivers,
Sous un bois tu te terres
Quand un lichen s'endort.
C'est ce matin -mystère... -
­Que fleurit l'hellébore.

Une noire ecchymose
Que les gelées talèrent
À ta corolle appose
Ses reliefs de chimères
Et teintes délétères.
Un ténébreux essor
Végétal a dès hier
Fait fleurir l'hellébore.

Forêts, sous vos lisières,
Sans cesse s'élabore
La provende des cerfs :
C'est la fleur d'hellébore.

DIZAIN DE ROBERT

Regardez-le de face, on dirait Robinson ;
Envisagé de dos, c'est le roi Dagobert.
Par devant, il a tout d'un robuste garçon,
Tandis qu'il semble encore, par derrière, impubère.
Il a, en commençant, du robinet le son,
Mais il s'achève à l'ouïe en bruit de réverbère.
Sa tête de robot a curieuse façon,
Et davantage encore sa queue de camembert.
Devinez-vous le nom dont, sans un doux frisson,
Les accords sur ma lèvre jamais ne succombèrent?

J'AI ZU

J'ai cru, j'ai cru quelquefois voir
Des rois, ocres, têtus et fauves
Parader sous les ostensoirs
D'un menu tilleul de guimauve.

J'ai pu, pu maintes fois sentir
En ses circonvolutions vierges
L'effluve bleu des cents martyrs
Qui d'ablutions vaines s'aspergent.

J'ai su, j'ai su parfois comprendre
- Ô la tendre et suave confesse ! –
­Qu'aux échelles des dieux la cendre
Est bourbe et grave chanoinesse.

J'ai dû, oui, j'ai dû autrefois
Déduire des faux frais de foire
L'historique frêne vaudois
De la fourbe Didon des douars.

J'ai lu, lu à n'en pouvoir mais
Les glabres manuscrits du ciel
Qu'en son verbiage libre émet
Le sabre attifé de soleil.


J'ai bu, bu tant et tant de fois
Aux bancs de l'arrière-saison
De vertigineux et sournois
Produits noirs de décuvaison.

J'ai vu, souventes fois revu
Le glorieux méat de velours
Dont le sanglot sapide et cru
Orne le gland des troubadours.

Mais combien de fois ai-je tu
- Et ce fut bien obstinément­ -
Le seul et vrai chagrin qu'ait eu
Mon cœur en ses âpres tourments?

LE BONHEUR DU MALE

C’est un trou de verdure où chante une cascade
Accrochant chaudement aux feuilles des pétales
De buée, où le soleil du mont Pelé gambade.
C’est un creux d’écrevisses aux moiteurs tropicales.

Un soldat jeune, ceinture ouverte et pantalon
Déboutonné, le cou sur un rocher moussu,
Se repose innocent sous les hibiscus blonds,
Mulâtre en son lit vert, activant sa massue.

Les brodequins dans l’herbe, il gémit et soupire,
Comme un enfant qui rêve, se caresse à loisir.
Amour, de tes baisers, il a besoin sans doute.

Radieux, il s’abandonne à un plaisir bénin ;
Sous le soleil qui darde, il cajole à la main
Sa bite. Il a versé quatre perles de foutre.

CHANSON DE LEUR PINE

J'aime sucer des queues
De matelots crasseux,
D'ouvriers miséreux
Et de truands teigneux.

J'aime pomper des dards
De petits savoyards,
De rustiques bâtards
Et de rudes bagnards.

J'aime avaler les pines
Des joueurs de mandoline,
Des fils de Palestine
Et des gars de Médine.

J'aime bouffer les zobs
De mon pote Jacob
Et de son frère Job
Ravis qu'on le leur gobe.

J'aime aussi qu'on m'encule
En pleine canicule
Et que l'on m'éjacule
Au fond du vestibule.

LE CALIBRE CHARMANT

Si vous voyiez, Messieurs, le vit de mon amant
Vous iriez épanchant par tous vos orifices
Une mouille profuse, émolliente cyprine
Propre à lubrifier par son intime onction
Les lieux de vos désirs. Car sachez-le sa pine
Lorsqu'elle est en repos atteint la proportion,
Alléchante à mon goût, d'une belle aubergine.
C'est assez suggérer du zob qu'avec délices
Il inflige à mon fion le calibre charmant.

LE VIT DE BUCEPHALE

Un Congolais nommé Nelson me sert de mâle.
Ce que j'adore en lui, c'est son énorme trique
Qui a la couleur dense des ébènes d'Afrique
Et une proportion foutrement idéale.

Son zob a l'épaisseur du vit de Bucéphale,
Ses couilles la lourdeur des granits d'Armorique,
Le volume fastueux des glaouis de bourrique,
Une senteur hircine, enivrante et vitale.

Le gland de mon amant cette drupe massive,
Ténébreuse, charnue, juteuse et sensitive,
Est monté sur un manche dont la roide vigueur

Sans nul tressaillement, jamais ne se dément,
Et dont, l'ayant graissé dans toute sa longueur,
Il gave abondamment mon trou du cul gourmand.

BALLADE D'AVRIL AUX TUILERIES

Quand un regain d'amour vous point au creux des reins,
Et que le jour permet de s'aller promener
Au jardin merveilleux où les garçons, sereins,
Arpentent les allées parmi de vieux poneys
Pour rencontrer peut-être un joli blondinet
Ou quelque amant plus mûr dont l’œil bleu leur sourie,
Ô, par amour pour eux, allez-vous en flâner
Par une après-midi d'avril aux Tuileries.

Et vous y trouverez le joyeux Séverin,
Le mitron des Abbesses, Alain le raffiné
Aux façons de gonzesse, Ursule le marin
Qui a vu Bornéo, tant et tant de minets
Au museau si charmant que, l’œil aiguillonné,
Le trousseau en folie et la lippe ahurie,
Vous les voudriez tous à la fois câliner,
Par une après-midi d'avril aux Tuileries.

Sous un tilleul en fleurs, au coin d'un boulingrin,
D'un regard aiguisé, bientôt vous discernez
Un adonis rêveur, flexueux athlète brun
À la bouche charnue, rondement dessinée.
Lorsque vous proposez chez vous de l'emmener,
Il acquiesce du chef, non sans galanterie.
Vous l'entraînez alors et vous abandonnez
Par une après-midi d'avril les Tuileries.

Puis, quand vous vous serez de tendresse échinés,
Et l'un l'autre salués, d'amour la pénurie
Vous renverra bien vite un amant braconner
Par une après-midi d'avril aux Tuileries.

BALLADE DES BACKROOMS

Comment te remercier,
Toi le gentil Michou,
Qui, d'un coquin courrier,
Me fis battre le pouls
Pour des plaisirs très doux
Et vins porter chez moi
La liste des lieux où
L'on baise et puis l'on boit?

Je te veux gratifier
En disant sans tabou
Comment samedi dernier
Je fis sucer mon bout
Par un charmant voyou
Au provocant minois
Dans un de ces bars où
L'on baise et puis l'on boit.

J'ai bien fort apprécié
D'aller tirer un coup,
Plaisir simple et léger
Par lequel, peu ou prou,
Un homme en rut déjoue
D'Onan les tristes joies,
Lorsqu'il se rend là où
L'on baise et puis l'on boit.

Ô Michel, je l'avoue,
C’est vraiment grâce à toi
Qu'enfin de tout mon saoul
Je baise et puis je bois.

BALLADE HADRIENNE

Toi, le joli Romain qui m'as sur ta Vespa
Fait traverser la Ville, allegro ma troppo,
Raillant ma blême peur que tu ne freines pas,
Pour éviter le choc, au moment où il faut,
Toi, l'adorable fou qui du parc du Pincio
Me menas en riant au Circus Maximus
Sans t'arrêter aux feux, toi, mon joli Mirko,
Prends-moi pour Hadrien, sois mon Antinoüs.

Toi, le charmant garçon, à peine homme, qui m'as
Ravi par la fraîcheur imberbe de ta peau
Et dont l’œil malicieux et blond m'enthousiasma
Autant que la silhouette élancée, sans défaut,
Toi, le gracieux gamin dont le rire arrache au
Cœur d'un sombre insensible un peu d'amour en plus
Pour tes lèvres ourlées, toi, mon charmant Mirko,
Prends-moi pour Hadrien, sois mon Antinoüs.

Toi, le bouillant amant qui ton corps me donnas
En sa fleur impollue, avec tout l'à propos
D'un midi de printemps villa Hadriana,
À l'heure où nul baiser jamais ne sonne faux,
Toi, le tendre puceau qui d'emblée mis au chaud
Le meilleur de moi-même au fond de... mais, motus,
Demeurons allusif, toi, mon bouillant Mirko,
Prends-moi pour Hadrien, sois mon Antinoüs.

Te quittant, je fais vœu, car ton futur me chaut,
Que tu vives toujours, in naturalibus,
Heureux et adoré. Mémorable Mirko,
Souviens-toi d'Hadrien, reste un Antinoüs.

Et moi, et moi, et moi!

Ma photo
Paris, Ile-de-France, France
Aède érotomane, mélancolique et blagueur.

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